Interview

Rencontre avec Jean-Luc Izoard, directeur administratif et financier d'Artémis, holding de la société Ellisphere pour aborder les enjeux de demain pour la fonction DAF

Jean-Luc Izoard

Parlons de l’avenir de la fonction de directeur financier. Quels sont les grands défis qui attendent la fonction DAF demain ?

Les grands défis ? Indéniablement, la transformation digitale, et son accélération. Le défi sera particulièrement important pour les entreprises qui n’ont pas encore initié cette évolution, qui est inévitable. Concernant Ellisphere, comme évoqué dans notre premier entretien, la transformation digitale est engagée depuis longtemps. Nous sommes clairement aujourd’hui dans la phase d’accélération, largement favorisée par la crise sanitaire actuelle, et les périodes de confinement.

Il est clair qu’une direction financière devra de plus en plus être en mesure de sourcer, analyser et monitorer des volumes de données de plus en plus importants, et ce bien au-delà des seuls besoins de la fonction finance.

Evidemment, les équipes manipulent des données financières, réalisent des reportings depuis longtemps… La nouveauté réside dans l’accroissement du volume des données réceptionnées et utilisées, ainsi que la multiplication des sources de ces informations, internes mais également externes à l’entreprise. Les échanges de données entre partenaires commerciaux deviennent plus volumineux. Les directions financières sont ainsi davantage confrontées à l’afflux d’information. Elles doivent en conséquence monter en compétences sur de nouveaux outils, de nouvelles façons de travailler.

Pour exemple, précédemment une direction financière travaillait essentiellement avec l’outil Excel ; c’était l’outil maître des collaborateurs. Cet outil est dorénavant progressivement remplacé par de nouveaux comme Business Objects, QlikView, ou encore Qlik Sense.

Chez Ellisphere, cette évolution qui est déjà engagée, nous permet d’analyser de plus grandes masses de données, financières mais aussi non financières (commerciales, de production…). Notre direction est ainsi devenue un acteur clé pour nourrir et construire la stratégie de l’entreprise. Elle offre des outils décisionnels plus performants, permettant d’accélérer la prise de décision. Il s’agit ici d’une réponse concrète à un enjeu clé dans le développement pérenne de l’entreprise.

Deuxième défi beaucoup plus opérationnel, la robotisation. On parle de digitalisation, mais on se dirige également vers la robotisation des process financiers. Là encore, chez Ellisphere, nous avons une longueur d’avance. La robotisation a permis de transformer des fonctions à faible valeur ajoutée, comme le traitement des factures, et ce dès leur intégration dans nos systèmes d’information. La robotisation réduit indéniablement le risque d’erreur, et aussi le temps de traitement, ce qui permet de fluidifier l’activité au sein des équipes, et ainsi de concentrer nos collaborateurs sur des tâches à plus forte valeur ajoutée, comme le contrôle et l’analyse.

 

La robotisation des process comptables et financiers va s’imposer à toutes les directions financières. En ce sens, des tâches à plus forte valeur ajoutée, même stratégiques, ne seront-elles pas également, à terme, automatisées avec l’apport de l’Intelligence Artificielle et du machine learning ?

Peut-être, mais nous n’en sommes vraiment pas là aujourd’hui. Et puis à qui ces machines parleront-elles ? A ce jour, ce sont des humains qui analysent, produisent, et avec beaucoup d’intelligence ! Et c’est sur la base de leur travail que de nombreuses décisions sont prises.

Les nouvelles technologies nous offriront des outils de plus en plus sophistiqués. L’Intelligence Artificielle nous aidera dans des process de décision très avancés, notamment en prévention des risques de crédit, de fraude, c’est évident.

Toutefois, je crois qu’à un moment, l’intervention humaine sera toujours indispensable, voire prépondérante. Ce sont encore des humains qui dirigent les entreprises, qui y travaillent, qui les font vivre.

 

Comment répondre aux nouveaux enjeux de transparence liés particulièrement aux impératifs de RSE ? Comment favoriser un cercle vertueux de l’économie, et le mettre en place au quotidien ?

Alors là, nous sommes au cœur d’un enjeu crucial, l’un des plus essentiels qui se profile devant nous. D’autant que les questions de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) dépassent très largement la direction financière.

Celle-ci aura un rôle important à jouer en matière de RSE. Elle devra être capable de garantir qu’elle-même, ainsi que ses partenaires commerciaux sont viables, et fiables, tant d’un point de vue économique et financier, que d’un point de vue extra-financier. C’est au demeurant ce que nous faisons déjà chez Ellisphere.

Demain, les directions financières seront amenées, en plus de la production de reportings financiers, opérationnels… D’élaborer des rapports extra-financiers avec de nouveaux indicateurs qui devront mesurer la performance de l’entreprise sur des questions sociales, environnementales et de gouvernance.

Ces éléments extra-financiers seront donc pris en compte dans l’évaluation d’une entreprise. A ce titre, en que fournisseur d’information, Ellisphere intègre dès à présent ces éléments, tant pour elle-même, que pour les entreprises qu’elle suit dans son référentiel de données.

 

Pensez-vous que les éléments extra-financiers auront le même poids que les informations financières dans l’évaluation d‘une entreprise ?  À quel moment ces critères extra-financiers viendront impacter la stratégie que vous pouvez mettre en place en tant que directeur financier ?

C’est déjà le cas aujourd’hui, par exemple, pour l’accès au financement lorsqu’une entreprise a besoin de s’endetter pour une opération de croissance externe.

Les partenaires financiers et investisseurs potentiels regardent de près aujourd’hui la performance financière et extra-financière de l’entreprise ; l’acceptation des crédits ou du financement, les taux d’intérêt appliqués dépendent de cette analyse.

Cette double approche financière et extra-financière n’est pas encore systématique, mais c’est un mouvement largement engagé. A moyen terme, elle sera devenue incontournable

 

Une dernière question sur les crypto-monnaies, la Blockchain… Avez-vous déjà engagé une réflexion sur ces sujets ?

Très clairement, ce sont des sujets que nous regardons, qui nous intéresse, mais qui dépasse aujourd’hui notre cadre opérationnel. La fonction DAF de demain sera peut-être, impactée dans notre quotidien, mais il est encore trop tôt pour l’affirmer.

Podcast

Découvrez dès maintenant notre podcast sur le portrait et l’évolution de la fonction DAF demain.

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