Les objectifs de cette audience publique étaient double. D’une part, notifier les griefs identifiés par l’AFA suite à ses contrôles effectués dès octobre 2017. D’autre part, c’était l’occasion de donner à Sonepar un droit de réponse sur ces points.

 

Des manquements à plusieurs piliers identifiés

L’AFA justifie l’audience par huit manquements aux dispositifs requis par  la loi Sapin 2. Cinq d’entre eux étaient encore d’actualité au moment de l’audience, ceux concernant la cartographie des risques, le code de conduite, la procédure d’évaluation des tiers, les procédures de contrôle comptable et la mise en place d’un dispositif de contrôle interne de prévention de la corruption. Sonepar a contesté fermement ces manquements.

Les piliers évoqués ici sont sans surprises ceux qui étaient jugés difficiles à appréhender ou à mettre en œuvre dans nombre d’études dont nous vous parlions précédemment.

Pour rappel, la conformité à cette loi nécessite la mise en place des huit mesures définies par l’article 17 :

Confirmation du rôle central de la cartographie des risques de corruption

Parmi ces manquements, le débat s’est vite concentré sur celui lié à la cartographie des risques de corruption. L’article 17 de la loi n°2016-1691 décrit celle-ci comme “une documentation régulièrement actualisée et destinée à identifier, analyser et hiérarchiser les risques d’exposition de la société à des sollicitations externes aux fins de corruption, en fonction notamment des secteurs d’activité et des zones géographiques dans lesquels la société exerce son activité”. C’est principalement d’en avoir sous-estimé l’importance qui fonde les griefs de l’agence de régulation. Au travers de cette cartographie, différents risques doivent être évalués, notamment le risque de corruption. Cette mesure va ainsi entraîner et façonner d’autres dispositifs, notamment l’évaluation des tiers, ainsi que les dispositifs de contrôles internes et comptables.

En tant qu’élément central du dispositif de mise en conformité à la loi Sapin 2, il convient de réaliser la cartographie des risques avec le plus grand soin sous peine de fragiliser l’ensemble de dispositif. C’est en substance l’un des messages principaux à retenir dans le cas Sonepar. Ainsi, bien qu’en partie externalisée auprès d’un cabinet de conseil, la prestation réalisée est jugée sous dimensionnée par rapport au besoin et au regard de l’entreprise concernée. C’est l’insuffisance des moyens engagés au regard de l’enjeu qui est ici en cause ; cette carence ayant eu un impact sur la qualité du livrable final selon l’AFA.

 

Pas de secteur d’activité plus ciblé ou surveillé

La nécessité d’adapter les moyens et les outils à mettre en place au contexte de l’entreprise est donc le premier enseignement de cette audition. D’autres messages forts sont passés avec cette audience. Le choix d’un distributeur comme première entreprise soumise à cette procédure de sanction peut par exemple interroger. En effet, ce cas traité par l’AFA revêt une valeur d’exemple, avec une décision qui peut sembler surévaluée au regard des manquements présumés. Sonepar n’a pas de prime abord le profil de l’entreprise en surexposition au risque de corruption ou de trafic d’influence en raison de ses activités transnationales ou sur les marchés publics. L’AFA ne semble donc pas privilégier des secteurs plus exposés au risque de corruption mais adresse l’ensemble du périmètre des assujettis.

 

Le contrôle prendrait il le pas sur le conseil ?

Une autre question peut se poser à la lecture des éventements. Les missions de l’AFA se scindent entre contrôle et conseil. Est-ce déjà la fin de la pédagogie et de l’accompagnement à l’appropriation du référentiel anticorruption français pour cette loi encore jeune ? Non pas vraiment, il est trop tôt pour tirer cette conclusion. Michel Sapin rappelait précédemment que l’agence disposait “de moyens de sanction pour faire de la pédagogie armée ». Charles Duchaine (Directeur de l’AFA) ajoutait « le conseil n’est absolument pas antinomique avec le contrôle ». Cet épisode est là pour rappeler que la pédagogie reste une priorité ; cependant, le pouvoir de sanction est dès à présent une réalité. Mr Duchaine a tout de même félicité Sonepar pour sa mobilisation sur les sujets abordés.

Il s’agit de facto d’un rappel à l’ordre en bonne et due forme à l’ensemble des entreprises assujetties*. Elles devront mettre en place un plan pertinent, adapté et motiver le tout dans un délai raisonnable. Dans le cas contraire, le risque de réputation que représente une audition de ce type est réel. Le président de l’AFA a conclu en rappelant les prochaines étapes pour le groupe familial ; il recommande ainsi à la commission de sommer le groupe de se mettre en conformité totale à la loi Sapin 2 et de la soumettre à un nouveau contrôle. Une sanction pécuniaire à l’entreprise et à son représentant légal (respectivement des montants de un million d’euros et de 200 000 euros) faisait parti de l’arsenal à la disposition de la commission. La commission devait statuer pour une décision finale sous quatre semaines à l’issue de l’audience.

 

SONEPAR : première entreprise conforme à Sapin 2

La commission a finalement statué le 4 juillet en faveur de Sonepar. La commission a ainsi jugé les manquements identifiés infondés. Aucune sanction pécuniaire n’est prononcée. La commission a ainsi déclaré “Aucun des manquements invoqués par le directeur de l’Agence pour proposer le prononcé d’une injonction n’a été constaté par la commission des sanctions”. La commission ajoute “il n’y a pas lieu, de prononcer d’injonction ni de sanction pécuniaire”.


Sonepar sort par le haut de cette confrontation. Elle devient la première entreprise française certifiée conforme à la loi Sapin 2. “C’est avec fierté que le groupe a pris connaissance de la décision de la Commission des sanctions de l’Agence française anticorruption du 4 juillet 2019 qui acte que Sonepar se conforme en tous points aux exigences de l’article 17, de la loi Sapin 2”, a expliqué Sonepar dans un communiqué publié mercredi

Ce cas permettra assurément à l’ensemble des entreprises d’avancer dans leur propre mise en conformité. Un cas pratique en somme s’inscrivant parfaitement dans la pédagogie souhaitée par l’AFA.

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