Après plus de six mois de travaux, le 28 mars 2018, le mathématicien Cédric Villani rendait public son rapport sur l’intelligence artificielle, point d’aboutissement de la mission parlementaire qui lui a été confiée par le Premier ministre en septembre 2017.

Le postulat de départ de ce rapport est simple : sans le phénomène du Big Data, l’intelligence artificielle ne pourrait connaître l’engouement économique et sociétal qui la caractérise depuis quelques années.

Historiquement, ce sont les milieux scientifiques et militaires qui ont mené les premiers, dès les années 50, les recherches concernant l’intelligence artificielle. Certains industriels de l’informatique ont contribué à la médiatisation des capacités cognitives de leurs systèmes d’intelligence artificielle, par exemple dans le cadre d’opérations de marketing, à l’image d’IBM avec les six parties d’échecs jouées dans les années 1990 entre le super-ordinateur Deep Blue et Garry Kasparov, champion du monde de l’époque.

La mise en données du monde (datafication) a été rendue possible par la création d’Internet, par la multiplication des capacités de calcul des ordinateurs grand public et par les GAFA*, premiers groupes à avoir basés leurs modèles économiques sur des données initialement brutes, ensuite restructurées, et in fine rendues signifiantes, donc pouvant être économiquement valorisées.

C’est ce nouvel or noir que nombre de start-ups raffinent depuis plusieurs années pour en tirer une valeur ajoutée, avec plus ou moins de succès. Cependant, toute entreprise, récente ou non, a un intérêt économique et de notoriété à engager une réflexion et des décisions stratégiques autour d’une innovation basée sur de l’intelligence artificielle.

Sans Big Data, point d’IA

Le rapport Villani pointe tout d’abord l’importance de la taille du corpus des données disponibles pour pouvoir avoir recours à de l’intelligence artificielle. Une donnée brute non analysée n’a que très peu de valeur en elle-même. C’est sa connexion avec d’autres dans le cadre de data lakes qui permet de la faire parler, de produire de la connaissance, et d’en tirer des informations optimisées et donc commercialisables.

Les entreprises, qui comme Ellisphere, manient depuis de nombreuses années de larges bases de données structurées, ont développé une expertise et une profondeur d’analyse uniques. C’est à cette expérience que doit se greffer, pour participer du mouvement de l’intelligence artificielle, un pan essentiel de celle-ci : l’apprentissage profond, ou machine learning. Ce qu’un humain ne peut effectuer du fait du caractère répétitif de certaines tâches ou d’une volumétrie trop importante de données, un algorithme peut le faire par la mise en corrélation d’un nombre de données très élevé.

L’intelligence artificielle au service de la rentabilité

La reproduction partielle des capacités cognitives de l’être humain permet l’optimisation des données numériques présentes dans les grandes bases de données de certaines entreprises. Ainsi, un algorithme entraîné pour cela, peut apprendre des données qu’il manipule, et en tirer de nouvelles informations.

Cette intelligence artificielle, à certains titres que l’on pourrait aussi qualifier de superficielle (considérée par les spécialistes comme étant encore de niveau faible), n’en a pas moins pour avantage de permettre à un système de créer des nouvelles informations, donc de la valeur ajoutée, de manière automatisée, et en continu.

La conjonction de modèles algorithmiques pertinents couplés à des données structurées peuvent ainsi constituer des leviers de croissance importants, et ce quelle que soit la taille des entreprises engagées dans un mouvement d’innovation lié à l’intelligence artificielle. Ceci constitue le pan profitabilité de l’intelligence artificielle mis en lumière par le rapport Villani.

Une réputation favorisée

Le rapport Villani met également l’accent sur la valorisation de l’entreprise liée à sa politique de communication autour de l’intelligence artificielle. Le gain de renommée lié au développement de solutions opérationnelles basées sur de l’intelligence artificielle constitue un acquis.

Dans cette optique, le rapport Villani préconise deux axes : la création de labels, et la mise en place de prix d’innovation de terrain.

Concernant les labels, l’idée est de s’adosser à celui des French Tech, dont le succès a été, en quelques années, de fédérer, de mettre en réseau et de rendre visible l’écosystème numérique français. Ainsi, est envisagé un nouveau label IA destiné à valoriser les entreprises optimisant leurs données grâce à de l’intelligence artificielle. Des réunions informelles (meetups), des conférences, des communications d’entreprises pourraient être organisées au sein de ce nouvel écosystème, dans le cadre de ce label.

Les prix d’innovation de terrain pourraient, quant à eux, mettre en lumière des entreprises, jeunes pousses ou non, qui développent des solutions opérationnelles innovantes ayant donné satisfaction à leurs clients.

Ce pan du rapport Villani affirme les apports potentiels de l’IA en termes de notoriété.

Une innovation coopérative encouragée

Enfin, tout mouvement créatif n’est pas pérenne s’il reste figé et contingenté. Le rapport Villani parle à ce sujet de nécessité de recherche « agile et diffusante ». Il propose ainsi la création d’Instituts Interdisciplinaires d’Intelligence Artificielle (3IA), qui réuniraient en leur sein, chercheurs, étudiants et entreprises.

Les entreprises pourraient ainsi interagir régulièrement sur leurs problématiques métier avec des chercheurs, et ainsi faire évoluer leurs solutions en fonction des conseils reçus. Ces échanges pourraient par exemple porter sur l’optimisation de leurs algorithmes ou sur des audits de leurs systèmes d’IA.

Les entités privées pourraient également s’associer aux dossiers présentés par les instituts, en tant que membres affiliés (via par exemple une cotisation annuelle adaptée à la surface financière de l’entreprise).

Cette interaction entre entreprises et recherche dynamiserait le mouvement d’innovation et l’émulation liée à l’intelligence artificielle.

Des recommandations dont la mise en œuvre est déjà planifiée

Ces recommandations du rapport Villani, énoncées sous le temps du conditionnel, ont été pour certaines d’entre elles précisées et parfois reformulées au futur par le Président de la République, Emanuel Macron, le 29 mars 2018, lors de son discours au Collège de France consacré à la présentation du plan de la France pour le développement de l’intelligence artificielle.

A ainsi été annoncé à cette occasion que devait être favorisée la « porosité entre le public et le privé, avec par exemple des chercheurs qui devraient être « autorisés à ce que la moitié de leur temps soit employée dans une entité privée, alors qu’aujourd’hui elle est de 20% ».

Le Président a également affirmé sa volonté de mettre en place un réseau de quatre ou cinq instituts interdisciplinaires d’intelligence artificielle dont la vocation sera d’accepter des financements privés.

Il est certain que nombre de recommandations énoncées dans le rapport Villani feront l’objet de décisions politiques dans les mois à venir.

Innovation, profitabilité et notoriété peuvent donner tout leur sens au développement potentiellement considérable de l’intelligence artificielle dans notre société, et plus particulièrement au sein d’entreprises qui, comme Ellisphere, ont fait le choix de l’innovation pour optimiser et valoriser leurs solutions opérationnelles.

*GAFA : Google, Apple, Facebook, Amazon