Des travaux publics suspendus à l’attentisme des donneurs d’ordres

L’attentisme en matière d’investissements publics a lourdement impacté le secteur des travaux publics en 2022. Malgré une période de cycle électoral théoriquement favorable et un assouplissement de la commande publique (relèvement du seuil des marchés de gré à gré), l’activité des travaux publics ne décolle pas. Plus généralement, sur les six premiers mois de l’année 2023, les travaux réalisés n’ont progressé que de +2,6%. Si les professionnels des travaux publics ont bénéficié de meilleures prises de commandes au 1er semestre 2023 (+13,8% par rapport à 2022), ce dynamisme est à tempérer, car cette hausse est en partie imputable à la seule commande de la ligne C du métro de Toulouse. Les inquiétudes persistent donc face à une reprise qui manque de tonus et de visibilité côté collectivités. Dans ce contexte, le Bâtiment & Travaux Publics (BTP) envisage une nouvelle érosion de son activité en 2023.

Baisse des permis de construire et des mises en chantier dans la construction neuve

C’est dans le logement neuf, où l’activité chute, que montent les inquiétudes. La construction neuve non résidentielle s’étiole et la faible progression de l’amélioration-entretien, portée par la rénovation énergétique, ne peut tout compenser. Pourtant, l’année 2022 fut marquée par un pic des permis délivrés après un afflux de demandes déposées fin 2021, anticipant l’entrée en vigueur d’une réglementation environnementale plus stricte. Cependant, après ce pic, le nombre de permis de construire délivrés sur 12 mois (août 2022-juillet 2023) a chuté à 397 000 selon le ministère de la Transition écologique, soit – 22,8% sur 12 mois et – 13,6% par rapport à la période d’avant crise sanitaire (mars 2019 à février 2020) ; une chute plus marquée pour les maisons individuelles (- 30%) que pour les logements collectifs (- 8%).

Dans la foulée, le nombre de mises en chantier recule également avec 333 100 chantiers commencés sur 12 mois, soit une baisse de – 13,2%, toujours selon le ministère. Cette évolution trouve ses origines dans la hausse des taux d’intérêt qui limite l’accès au crédit, principalement pour les primo-accédants, la hausse des coûts de construction sous l’effet des crises successives et des nouvelles règles environnementales, ainsi que la diminution des aides à la construction neuve (loi Pinel et recentrage du prêt à taux zéro).

Une population d’entreprise toujours dynamique, mais qui marque le pas

Le secteur de la Construction, comprenant les travaux publics, le gros et le second œuvre, reste dynamique. Entre juin 2022 et juin 2023, sa population d’entreprises actives a ainsi progressé de + 3,7%.
Une évolution moindre que ces dernières années durant lesquelles la croissance atteignait plus de + 5% par an, passant sous le chiffre d’avant crise de 2019/2020. Cette évolution marque les difficultés croissantes que connaît ce secteur. Cependant, de belles progressions du nombre d’entreprises sont enregistrées sur des segments portés par la rénovation énergétique et l’amélioration de l’habitat : travaux d’étanchéification (+ 7%), travaux d’équipements thermiques et de climatisation (+ 6,2%), travaux d’installation électrique sur la voie publique (+ 6,8%) et travaux d’isolation (+ 4%). Numériquement, le secteur de la Construction reste le premier au plan national représentant un peu plus de 6% des entreprises et des salariés en France. Le secteur est dominé par les activités de gros et second œuvre dont la maçonnerie générale qui représente 16% des entreprises et 13% des effectifs en France. Les travaux d’électricité, de peinture et de vitrerie cumulent ensuite un quart des acteurs pour 19% des postes salariés français.

Une sinistralité nettement repartie à la hausse

La sinistralité des entreprises dans le secteur de la Construction est nettement repartie à la hausse depuis 2022 avec + 39%. A fin juin 2023 sur 12 mois glissants, ce sont près de 9 500 entreprises de la Construction qui ont déposé leur bilan, un chiffre en augmentation de + 42% sur un an. Des évolutions importantes du nombre de défaillances d’entreprise sont relevées pour les donneurs d’ordre de la maçonnerie générale (+ 42%) et de la construction de maisons individuelles (+ 30%). La hausse du prix des matières premières, les retards d’approvisionnement et l’asséchement progressif des mises en chantiers sur le neuf touchent plus particulièrement ces professionnels, puis en cascade leurs sous-traitants de l’installation électrique (+ 61,6% du nombre de défaillances), de la peinture et vitrerie (+ 43,2%), et de la menuiserie bois et PVC (+ 47%). Sur le plan régional, l’Ile-de-France représente près du quart des défaillances d’entreprise métropolitaines, région suivie par l’Auvergne-Rhône-Alpes, la PACA et l’Occitanie. Cette dernière région présente par ailleurs l’une des évolutions les plus importantes du nombre de défaillances avec + 51,6%, augmentation affectant notamment les départements de l’Hérault et du Gard, respectivement avec + 62% et + 60% de défaillances d’entreprise. La sinistralité des entreprises dans le bâtiment
reprend donc son rythme d’avant la pandémie du Covid-19, pour revenir à son niveau de 2019. À fin juin 2023 sur 12 mois glissants, plus de 36 000 postes salariés étaient ainsi menacés par les défaillances. Dans ce contexte, la Fédération française du bâtiment (FFB) craint 150 000 suppressions d’emplois d’ici 2025.

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